L’enfance est sans doute la plus naïve de toutes les périodes de notre vie. Quelques années d’ignorance. Quand j’étais plus petite je ne comprenais pas pourquoi toutes ces si grandes personnes m’enviaient, pourquoi elles ne cessaient de me regarder droit dans les yeux, avec la plus grande des nostalgies, et me répétaient : « Tu as de la chance d’être une enfant ma petite, tu comprendra en grandissant ».
Comprendre ? Qu’est-ce que je devrai comprendre ? Je savais lacer mes chaussures. J’apprenais l’Anglais en chantant. J’avais compris que les garçons devaient faire des bisous à leur amoureuse, d’ailleurs ma copine Serena trouvait ça dégoûtant, donc moi aussi. Je ne voulais pas comprendre. Pourquoi toujours comprendre ? Ils n’avaient que ça à la bouche. Moi ce que je voulais c’était vivre avec une famille, ma nouvelle famille, et Serena. Je me moquais de toutes ces personnes avec des gros boutons qui me parlaient comme une personne malade et m’expliquaient tout le temps la signification de mots que je connaissait très bien. Je ne voulais pas ressembler à cela. Jamais.

Je m’étais d’ailleurs promis de ne jamais grandir. J’attendais avec impatience le jour ou un certain Peter arriverai chez moi pour m’emmener loin, très loin. Me faire découvrir un nouveau monde, rempli de couleurs et de joie, un monde idéal. Une utopie. Je m’imaginais souvent, la nuit tombée, son arrivée. Il m’apprendrais a voler et m’emmènerai avec lui, tout serait différent. Quelque chose d’exceptionnel loin de toutes les réalités de ce monde, loin de la fatigue, des adultes, du travail. La vie me paraissaient tout d’un coup bien plus simple lorsque je m’endormais, lorsque Morphée me prenais dans ses bras et m’emmenait loin, là ou chacune de ces étranges personnes n’allaient plus de puis longtemps. J’étais d’ailleurs sure que c’était ça la raison, la cause. Les adultes ne prenaient pas le temps de s’évader, ils restaient dans leur monde, leur réalité, les problèmes.

A 14 ans ...< Mae’ bouge toi on va être en retard sérieux! >< Ouais j’arrive calme t’es hormones oh! ‘tin saleté de pompes là ! Pff >

A 17 ans < Un café s’il vous plais. >< Tout de suite. >

A 17 ans trois quart. < J’ai pas compris ? >< Bah va demander à ta mère.> < Oh mais pourquoi tu m’agresse ? >< Quoi? Tu m’a demandé d’être gentille ?>

Flash-back

< Maman ? Maman c’est toi ? >< C’est qui ? >< C’est rien, juste ma fille. Fais pas attention! >
Il était plus de minuit. Elle m’avait laissé seule pendant plus de deux heures. J’avais 6 ans. Je m’étais couchée effrayée comme jamais je ne l’avais été auparavant. Maintenant je n’étais pas plus rassuré. Elle était surement encore dans cet état vous savez quand quelqu’un est bizarre, rigole pour rien et marche comme les clowns à l’école ? Je n’avais jamais vraiment vu ma mère autrement à vrai dire.

Flash-back



Flash-back

< Qui était mon père maman? >< Chérie passe moi la clef. me dit-elle avant de replonger sa cigarette dans l’ouverture étroite de ses lèvres. >< Maman je veux savoir cette fois! J‘ai 13 ans je peu savoir non ? >Elle me vit insister et me foudroya immédiatement du regard. < Tu veux vraiment le savoir ? Très bien. Ton père est décédé quelques temps avant ta naissance. Il était malade. Très malade, c’était incurable. > Elle avait ce regard qu’on les personnages dans les beaux films. Vous savez les films qui vont font pleurer à tout les coups? J’adorais ce genre de film avant, maintenant ils me ramènent systématiquement à mon père. Je revois sans arrêt le regard perdus, effrayé de ma mère. Malgré tout c’était une personne comme vous et moi, avec un cœur. C’était justement cela qui lui faisait défaut, c’était là le problème. Elle n’étais pas indifférente à la mort, et perdre son mari l’avait blessée. D’une blessure tout aussi incurable que la maladie.

Flash-back

Clac. Clic. < Maelys bordel tu nous fais quoi là tu sais plus poser ? Réveil toi ok ?! >< Ouais bon alors tout d’abord ton éclairage est nul et ensuite si ça te plais pas ben tu vas te faire cuir un œuf mon coco ok? >< Très bien tu sais quoi ? Tu es virée. >< Je comptais pas rester ici une minute de plus de toute façon ! >. Clac. Ce n’est plus le bruit du flash, cette fois ci c’est la porte que je viens de claquer en sortant.
J’exagère vous pensez ? Moi pas. Cet abruti me dit ce que je dois faire alors que je sais parfaitement ce que je vaut. Je n’ai pas besoin de son avis, mon travail je le fais et j’en suis fière si il n’aime pas mes photos il peut remballer sa séance. Et le chantage financier n’y changera pas grand-chose non plus.
Oui j’étais en train de repenser à certaines choses .. mon enfance entre autre. Mais c’est normal non ? Je veux dire, j’ai si longtemps attendue qu’on vienne me dire avec fierté et droit dans les yeux que je ne suis que la victime d’une caméra cachée géante et que mes parents sont derrière prêts à bondir pour me crier « piégée! » mais non. Ca n’arrivera pas. Plus maintenant, maintenant que je sais que ce genre de surprises n’arrivent que dans les illusions, dans le virtuel. Alors qu’est-ce qu’il me reste ? Mes pensées. Mes souvenirs, que je m’efforce de garder. Le plus longtemps possible, jusqu’au jour ou j’aurai fais mon deuil. De quel deuil je parle ? Je parle de la mort de mon père. Ca fait plus de 20 ans maintenant oui, mais rien n’y fait. J’ai beau me dire que tout va s’arranger, que tout peu changer. J’ai envie de pouvoir parler de lui au passé, de prononcer son nom fièrement sans que mes larmes ne se mettent à couler. Mais je n’y arrive pas, je n’essai peut être pas assez oui mais l’envie n’est pas toujours là. En fait je pense que je n’ai pas encore réalisé qu’il est là haut. Je pense qu’à part les nuages et oiseaux je ne vois pas mon père dans le ciel, lorsque je lève la tête ce n’est pas à lui que je pense mais à mes grands-parents.

Mais la seule personne qui sait ça est maintenant même en train de préparer l’arrivée de sa nouvelle ‘super pote’. Voilà la deuxième raison de ma colère. Je ne veux pas qu’elle s’éloigne de moi, et si elle me remplaçait par cette française? Autant dire adieu à tout ce que j’ai. Oui parce qu’au fond à bien y réfléchir, qu’est-ce-que j’ai ? De quoi est-ce-que je pourrai me vanter ? Qu’est-ce-qui fait ma force ? Il n’y a qu’elle. Il n’y a qu’elle qui n’a pas encore retourné sa veste, elle et Anne qui me sont très proches. Ce sont vraiment les seules personnes qui ont réussi à me cerner immédiatement. Sans Serena, j’aurai été la fille perdue de rodéo drive. Aucune de ces lolitas ne correspondaient à mon style. Aucune sauf elle.